Projets ITINERA ELECTRONICA - HODOI ELEKTRONIKAI - HELIOS

Actu' ITINERA+ (Actualités - Nouvelles)


  Accueil     Liste des actualités     Recherche     Actualité     Administration  

Date :     16-04-2004

Sujets :
Environnements hypertextes : Cicéron, Érasme, Tite-Live; Erasmiana;

Notice :

1. Environnements hypertextes :

Les environnements hypertextes constitués pendant la semaine concernent:

Les textes bruts de ces oeuvres sont disponibles au format .txt dans le Dépôt ITINERA ELECTRONICA :


2. Erasmiana:

  • De l'utilité des Colloques : lettre au lecteur :

    " ... La lettre [au lecteur] débute par un bref rappel de l'histoire du livre, avec un mot spirituel sur l'édition subreptice des Formulae en 1518: «Prima pars huius operis, quae mea fuit et non mea».
    Érasme montre ensuite la portée religieuse des Colloquia. Il réfute les reproches que l'on pourrait adresser à ses dialogues. C'est presque toute son oeuvre, jusqu'en 1526, qu'il passe ainsi en revue. Vingt-neuf dialogues sont évoqués, les uns en quelques mots, d'autres avec des développements variés. Sur ces vingt-neuf dialogues, quatorze n'avaient pas été atteints par le jugement des théologiens de Paris. Par contre, on est étonné de ne pas trouver, dans la lettre d'Érasme, mention des colloques suivants: Naufragium, Diuersoria, Epithalamium,Echo. Il est vrai que la plupart d'entre eux ne prêtent guère à discussion, pas plus que les premières Formulae. L'omission du Naufragium est difficilement explicable. Érasme devait prévoir que ce dialogue - qui compararait Marie à Vénus et ridiculisait l'invocation des saints - susciterait des objections passionnées.

    D'autre part, il est assez piquant de constater les précautions que prend Érasme, en mars 1529, lorsqu'il assume préventivement la défense de six nouveaux colloques, au moment même où il les publie: Charon, Synodus grammaticorum, Cyclops, Conuiuium impar, g-Hippeus g-anippos et Senatulus. Le nombre des colloques dont Érasme fait l'éloge s'élève alors à trente-sept.

    En septembre 1529, Érasme met la dernière main au De Vtilitate. Aucun nouveau dialogue n'est cité, mais il attaque ouvertement la Sorbonne et ses deputati male putati. On pourrait même croire qu'il possède le texte des censures s'il ne les citait inexactement. Il revient à la Pietas puerilis, au Conuiuium profanum, à la Virgo g-misogamos, à l' g-Ichthuophagia et à l'Inquisitio. Il conclut en dénonçant les fauteurs de discorde et en conseillant la paix dans la charité.

    Au total, le De Vtilitate colloquiorum porte les marques d'une rédaction rapide, agréable d'ailleurs, éloignée de toute analyse systématique. Érasme y déploie ses dons de polémiste et de pédagogue. Il insiste, avec prédilection et avec bonheur, sur le genre littéraire de son livre, «quod ludendo discitur» . Adroitement, il se compare à Socrate : «Socrates philosophiam e coelis deduxit in terras, ego philosophiam etiam in lusus, confabulationes et compotationes deduxi» . Il se vante d'avoir joué plusieurs rôles, sans qu'aucun de ses personnages ne soit son porte-parole: «Stulti personam suscepi ».
    Érasme minimise volontiers les critiques de ses adversaires; parfois, il joue sur les mots; il lui arrive même de nier l'évidence, mais il est ferme sur l'essentiel, en ceci qu'il maintient contre tous la primauté des belles-lettres, les droits de la paix et les exigences de la Philosophie du Christ. ..."

    [tiré de : Opera omnia Desiderii Erasmi Roterodami, t. I, 3 , Amsterdam, 1972, p. 718]

  • Les Colloques :

    "... Chef-d'oeuvre d'audace calculée et de «feinte innocence», les Colloques illustrent le sens de l'universel, si caractéristique de leur auteur. Érasme trouve de la beauté et de la sainteté jusque dans le paganisme. Il est attentif aux querelles religieuses de son temps, mais il les dépasse en prêchant la paix aux princes et la piété aux théologiens.

    Erasme vante les vertus naturelles ou chrétiennes. Il ne coupe pas l'homme de ses racines, tout en faisant comprendre que l'homme dans sa plénitude, c'est l'homme transformé par l'Évangile. Après Platon, Lucien et tant d'autres, Érasme réussit à élever ses lecteurs à son niveau sans jamais descendre au leur.

    A travers la soixantaine de ses Colloques, les idées les plus diverses circulent, s'affirment et, subtilement, s'accordent. Les thèmes majeurs d'Érasme sont ceux de ses traités les plus graves : les belles-lettres, la paix, la philosophie du Christ. Ils sont repris dans les dialogues avec une présentation originale et une force nouvelle. Le genre littéraire adopté permet de montrer successivement le pour et le contre, de multiplier les traits pittoresques, de traduire les théories en situations et en actions concrètes.

    On le voit, les Colloques ne se réduisent pas à un divertissement de l'esprit, à une suite de propos de table ou d'anecdotes savoureuses, ou plutôt, ils sont cela et bien davantage. Sous leur forme enjouée, moqueuse souvent et parfois mordante, ces dialogues permettent de saisir sur le vif la pensée d'Érasme. Ils touchent indiscrètement à l'une ou à l'autre des grandes préoccupations de l'heure, pour tous les âges, pour toutes les conditions, pour toutes les professions.

    Autour des idées essentielles, sans cesse reprises et approfondies, s'articulent des thèmes mineurs empruntés à l'expérience quotidienne. Les Colloques abondent en documents sur la vie sociale, en variations sur les problèmes de l'homme et du chrétien. Les personnages d'Érasme sont vivants, ses situations réelles, ses récits cohérents. Il raconte bien et, grâce à ses dons d'observation et d'exposition, il peint ses contemporains de vives couleurs. Il a le génie de la mise en scène et ses comédies en un acte sont pleines d'humour et de bonhomie, mais aussi d'émotion et de sagesse. Son style n'est jamais contraint, il est naturel et détendu.

    Tels sont les Colloques. Dans leur forme définitive, ils ne sont pas seulement le miroir d'une vie, l'histoire d'un esprit et le journal d'une âme, ils sont aussi le miroir de la vie des contemporains de leur auteur. Ils laissent le lecteur amusé, parfois déconcerté, jamais abusé. On comprend que les Colloques aient été un des plus grands succès de librairie du XVIe siècle. Malgré les anathèmes des théologiens, ils ont conquis à Érasme un public sans cesse renouvelé. Ils ont même été «récupérés» par ses adversaires. A tous leurs lecteurs, ils ont donné l'exemple d'une latinité distinguée et le goût de la réflexion critique.

    Ces lecteurs, Érasme les interpelle, il les ramène sans cesse à la question, c'est-à-dire à la conscience de leur responsabilité personnelle : là est le point fort de la morale érasmienne.

    La critique ecclésiastique accompagne les Colloques d'édition en édition. La Sorbonne les condamne en 1526, sa sentence sera publiée en 1531. Aux Pays-Bas, en Angleterre et en Espagne, l'alerte n'est guère moins chaude. Érasme riposte en 1532 par ses Déclarations contre les censures de la Faculté de Théologie de Paris. Cette pesante démonstration reprend point par point les cenures et les réfute.

    Érasme défend ses Colloques. Il voudrait que son livre soit considéré comme un ensemble où les assertions des uns sont corrigées ou atténuées par les répliques des autres. Il peint les hommes tels qu'ils sont afin qu'ils se transforment en ce qu'ils devraient être. Son petit théâtre suppose un perpétuel affrontement dialectique de pensées, de comportements et d'attitudes contraires : ce sont des scènes de la vie quotidienne au début du XVIe siècle.

    A un de ses amis, Érasme confesse que ce livre qui distrait les lecteurs et enrichit les imprimeurs est une source de déboires pour son auteur. Il n'ajoute pas ce qu'il ne peut cependant oublier : les Colloques ont fait merveille pour la gloire d'Érasme et pour la propagation de ses idées. ..."

    [tiré de: Léon-Ernest HALKIN, Érasme parmi nous, Paris, Fayard, 1987, pp. 302-304]


Jean Schumacher
16 avril 2004


 
UCL | FLTR | Itinera Electronica | Bibliotheca Classica Selecta (BCS) |
Analyse, design et réalisation informatiques : B. Maroutaeff - J. Schumacher

Dernière mise à jour : 17/02/2002